08/07/2025

Quand iOS 18 fragilise l’accessibilité : entre promesses et bugs UX

La dernière mise à jour d’iOS fait beaucoup parler d’elle, mais pas pour les bonnes raisons. De nombreux utilisateurs signalent des régressions importantes en matière d’expérience utilisateur, et plus inquiétant encore : des problèmes d’accessibilité qui compromettent l’usage du système pour les personnes en situation de handicap. VoiceOver instable, champs de formulaire illisibles, navigation erratique… Cette mise à jour rappelle une vérité trop souvent négligée : l’accessibilité n’est pas un acquis, c’est une exigence continue.

Contexte : iOS 18 et les limites d’une mise à jour « mineure »

Alors qu’Apple annonçait une version 18.6 centrée sur la stabilité et les performances, les retours utilisateurs révèlent un tout autre scénario. Derrière une façade technique discrète, cette mise à jour a introduit des dysfonctionnements notables, en particulier sur le plan de l’expérience utilisateur et de l’accessibilité.

 

Nouveautés annoncées : un focus sur la stabilité

 

iOS 18 ne promettait pas de révolutions. Les notes officielles évoquaient des correctifs de sécurité, des améliorations générales de performance, ainsi que des ajustements pour la conformité avec certaines réglementations. Aucun changement majeur d’interface ou de fonctionnalités n’était attendu. Pour beaucoup, cette version devait simplement renforcer la fiabilité du système.

 

En interne, les builds bêta (notamment la version 22G064D) ont été déployées sans engouement médiatique, et la release stable a suivi un rythme classique, avec peu de documentation publique sur des modifications profondes.

 

Mais aussi… des dysfonctionnements inattendus

 

C’est pourtant dans les jours qui ont suivi cette mise à jour que les premiers signes d’instabilité ont émergé. Forums d’utilisateurs, communautés de développeurs et testeurs en situation de handicap ont commencé à signaler une série de problèmes d’usage concrets, notamment :

  • Des erreurs de navigation dans les réglages d’accessibilité ;
  • Des comportements incohérents de VoiceOver ;
  • Des champs de formulaires qui ne sont plus lus correctement ;
  • Des ralentissements lors de l’interaction avec certaines apps.

Des discussions sur des plateformes comme AppleVis ou Discussions Apple ont fait remonter ces régressions, en pointant du doigt une absence de tests spécifiques pour les outils d’assistance. Ce n’est pas la première fois qu’iOS provoque de telles régressions sur ces sujets, mais leur récurrence interroge.

Pourquoi ces régressions sont alarmantes ?

Les problèmes d’accessibilité apparus avec la mise à jour iOS 18.6 ne relèvent pas de simples désagréments techniques. Ils soulèvent des questions de fond sur la manière dont les systèmes d’exploitation, même les plus réputés pour leur souci d’inclusion, peuvent basculer vers une forme d’exclusion fonctionnelle. Ces régressions ne sont pas seulement gênantes : elles sont structurellement dangereuses pour l’expérience utilisateur de millions de personnes.

 

La conformité WCAG / RGAA est un processus continu

 

L’un des malentendus fréquents en matière d’accessibilité numérique est de la traiter comme un objectif ponctuel à atteindre; une sorte de check-list à valider. Or, les référentiels comme les WCAG (Web Content Accessibility Guidelines) ou le RGAA rappellent au contraire que l’accessibilité est une exigence évolutive et continue.

 

Chaque mise à jour du système, chaque refonte d’interface, chaque refactoring de code peut remettre en cause la conformité initiale :

  • Un composant auparavant bien balisé peut devenir invisible aux lecteurs d’écran ;
  • Une logique de navigation modifiée peut rendre un formulaire inutilisable au clavier ;
  • Un simple changement d’animation ou de feedback visuel peut désorienter les personnes ayant des troubles cognitifs ou neurologiques.

Ce sont précisément ce type de glissements qui ont été observés dans iOS 18 : les tests de non-régression sur l’accessibilité semblent avoir été absents ou insuffisants, ce qui a ouvert la porte à des effets domino sur l’expérience utilisateur.

 

Risque pour les utilisateurs vulnérables

 

Au-delà de la conformité réglementaire, ces régressions ont un impact direct, concret et souvent brutal pour les personnes concernées :

  • Perte d’autonomie : lorsqu’un champ de mot de passe n’est plus lisible vocalement, l’utilisateur ne peut plus se connecter à ses services.
  • Isolement numérique : un bouton non détecté par VoiceOver peut empêcher une action essentielle — valider une commande, envoyer un message, activer une fonction.
  • Stress et frustration : lorsqu’une personne doit trouver une solution de contournement ou demander de l’aide, l’expérience devient humiliante et anxiogène.

 

Pour une entreprise comme Apple, souvent citée en exemple pour son avance sur les sujets d’inclusion numérique, ces défaillances mettent aussi en jeu sa crédibilité et sa responsabilité. Une promesse d’accessibilité ne vaut que si elle est tenue de manière constante, dans toutes les conditions d’usage.

Bonnes pratiques : comment éviter ces pièges à l’avenir ?

Les régressions d’accessibilité observées dans iOS 18.6 ne sont pas une fatalité. Elles révèlent plutôt un manque de rigueur dans l’intégration des enjeux d’accessibilité dans les processus de développement, de QA (assurance qualité) et de gestion produit. Pourtant, des solutions existent — et elles sont à la portée de toute organisation, à condition d’en faire une priorité dès la conception.

 

Stratégie de QA : combiner tests automatisés et tests humains

 

L’accessibilité ne se teste pas uniquement avec des outils automatisés et encore moins une seule fois, en fin de projet. Une stratégie de qualité sérieuse implique :

  • Des tests unitaires et fonctionnels incluant des scénarios d’accessibilité (navigation clavier, compatibilité VoiceOver, gestion des focus, etc.) ;

  • Des outils automatisés comme Axe, Pa11y, WAVE ou Lighthouse pour détecter rapidement les erreurs de contraste, d’alternatives textuelles ou de structure HTML ;

  • Des tests manuels réalisés par des personnes en situation de handicap, indispensables pour identifier les blocages réels, ceux que les outils ne voient pas.

 

Cette approche mixte permet de limiter les risques de régression à chaque itération, et de documenter précisément les écarts ou les zones sensibles.

 

Intégrer l’accessibilité dans chaque release

 

L’accessibilité ne doit pas être une phase à part, mais un fil conducteur du cycle de vie produit.

 

Cela implique :

  • La définition d’objectifs d’accessibilité par sprint, au même titre que la dette technique ou les performances ;
  • L’intégration de checklists RGAA/WCAG dans les critères d’acceptation ;
  • La mise en place de feedback loops à chaque mise à jour, via des outils comme Apple Feedback Assistant, les forums développeurs, ou des canaux internes de retour utilisateur.

 

Les entreprises qui réussissent à maintenir une bonne accessibilité dans le temps sont celles qui l’intègrent dès l’amont, dans les rituels produit, les décisions UX, et les phases de QA. Sans cela, chaque nouvelle version devient un risque potentiel pour des millions d’utilisateurs.

Appel à la vigilance

Ce qui devait être une mise à jour technique de routine s’est transformé en signal d’alerte. iOS 18 révèle à quel point l’accessibilité reste un point de fragilité dans les processus de développement logiciel même chez les acteurs les plus avancés du marché.

 

Ces régressions ont un impact humain direct. Elles rappellent que l’accessibilité n’est jamais acquise, qu’elle doit être maintenue, testée, améliorée à chaque cycle. Un bouton mal étiqueté, un champ non vocalisé, une navigation imprévisible : autant de détails qui, mis bout à bout, peuvent exclure un utilisateur.

 

Face à cela, les équipes design, produit et tech ont une responsabilité partagée. Il ne suffit pas de se déclarer « accessible » ou « inclusif » : il faut le prouver dans les usages, les mises à jour, les tests.

 

Cette étape concerne aussi les décideurs de l’entreprise. L’UX researcher doit les interviewer afin de récolter des informations sur les objectifs qu’ils envisagent de réaliser et les indicateurs clés qu’ils veulent exploiter pour analyser le comportement et les besoins des utilisateurs.

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